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Railcoop : Nous sommes un nouvel acteur de l’aménagement du territoire


Alexandra Debaisieux, Directrice générale déléguée chez Railcoop

Railcoop est la première coopérative ferroviaire en France. Pourquoi avez-vous pris l’initiative de choisir le statut de société coopérative d’intérêt collectif ? A votre sens, c’est « la démocratie contre la technocratie » ?


Le modèle coopératif que nous avons choisi est une SCIC (société coopérative d’intérêt collectif). À travers ce modèle, Railcoop rassemble les citoyens, les entreprises, les collectivités et plus largement toute personne physique ou morale partageant un objectif commun : concevoir des services ferroviaires adaptés aux besoins de tous les territoires. La vision que Railcoop a du modèle coopératif, c’est qu’il permet de rassembler et de créer un service qui répond à un besoin, en incluant toute personne voulant participer à cette aventure. Le modèle que nous portons, peut être vu comme une alternative au modèle plus classique, à l’heure où nous traversons une crise sanitaire et ou la question écologique est de plus en plus pressante, le positionnement de Railcoop permet à chacun de s’investir en promouvant un modèle avec des valeurs écologiques, économiques, sociales et démocratiques.

Qui peut devenir sociétaire de Railcoop ? Les parts sociales déterminent-elles le droit de vote ? Les bénéfices sont-ils réinvestis dans la coopérative ?


Chaque sociétaire, peu importe le nombre de parts détenues, a une voix dans son collège au sein de l’Assemblée Générale. Il existe aujourd’hui chez Railcoop 5 collèges de sociétaires : les salariés, les personnes physiques, les personnes morales, les collectivités territoriales et institutions et les partenaires techniques et financiers. Les personnes mineures peuvent, elles aussi, devenir sociétaires. Dans une SCIC, au moins 57,5% du résultat doit être conservé dans l’entreprise pour développer son objet social.

Appliquer l’économie sociale et solidaire au ferroviaire en valorisant les structures inexploitées en France devrait être une priorité de l’Etat. Avez-vous le sentiment que « la mobilité ferroviaire » est la grande oubliée de la transition environnementale ?


L’économie sociale et solidaire (ESS) est l’émanation d’acteurs privés qui associent acteurs publics, citoyens, salariés, collectivités locales. L’Etat peut être partie prenante de cette dynamique en étant lui-même sociétaire ou en incitant les acteurs de l’ESS à s’engager. Il peut par exemple apporter des garanties publiques mais l’ESS n’est pas uniquement une prérogative de l’Etat, c’est un champ économique concurrentiel.


La mobilité ferroviaire n’est pas la grande oubliée de la transition écologique, il y a beaucoup d’annonces faites par le gouvernement sur le redéveloppement de la mobilité ferroviaire. Développer la mobilité ferroviaire, c’est aussi développer une pluralité d’offres et favoriser l’émergence d’acteurs différents, avec des positionnements de marché différents, des offres différentes. Si l’Etat veut jouer la carte de la mobilité ferroviaire et de la transition écologique, il faut qu’il favorise l’émergence d’une pluralité d’offres et ce, d’une manière coordonnée.

90% des Français résident à moins de 1km d’une gare, alors qu’un tiers d’entre elles ne sont pas desservies. A un moment où la demande ferroviaire n’a jamais été aussi forte, où la transition écologique est une priorité, vous définissez-vous comme un nouvel acteur de l’aménagement du territoire ?


Railcoop se définit complétement comme un nouvel acteur de l’aménagement du territoire. Notre positionnement est de faire revivre les territoires ruraux qui ne sont aujourd’hui plus desservis et de les connecter aux métropoles. Notamment avec la ligne Bordeaux-Lyon, notre enjeu n’est pas de connecter Bordeaux à Lyon mais de connecter Limoges à Lyon, Roanne à Bordeaux ou Gannat à Lyon en direct.


Donc oui, nous sommes un nouvel acteur de l’aménagement du territoire. D’autant plus que nous sommes dans un modèle de gouvernance qui permet de faire phosphorer. La coopérative Railcoop est un véritable creuset d’intelligence et d’ingénierie territoriale, il y a des petites villes qui viennent chercher au sein de Railcoop cette ingénierie territoriale pour penser certains sujets comme : faire vivre les gares, créer des pôles multimodaux, …

On parle beaucoup de la France des métropoles face aux villes moyennes et aux territoires ruraux. Vous avez relancé la ligne Bordeaux Lyon avec 9 arrêts dans des villes moyennes comme Périgueux, Guéret, Montluçon, Gannat… Les collectivités locales ont-elles participé à ce projet ? De quelle manière ?


Les collectivités locales peuvent participer au projet en devenant sociétaires à leur tour. Parmi les collectivités locales sociétaires nous comptons : le Département de la Creuse, le Syndicat mixte du Livradois-Forez, les villes de Gannat et de Vichy, les communes de Bègues, Faux-la-Montagne, Blars et Blessac, la Communauté de Communes de Saint-Pourçain-Sioule-Limagne, Vichy Communauté, Montluçon Communauté et la Communauté d’Agglomération du Libournais, Saint-Germain-des-Fossés. Mais nous avons un point de vigilance : le pourcentage de l’investissement public est limité dans la coopérative à 50% et nous fonctionnons sans subvention publique.

Vous souhaitez compléter l’offre ferroviaire existante. Considérez-vous que votre principal concurrent soit la SNCF ou la route ?


Railcoop a toujours soutenu qu’elle est un concurrent de la route et vient en complémentarité de la SNCF afin de répondre aux besoins des territoires qui ne sont aujourd’hui plus desservis par un service ferroviaire. Railcoop se veut comme un acteur qui complète le maillage ferroviaire français.

Considérez-vous qu’en rassemblant l’ensemble des parties prenantes, la co-décision publique-privée, est une méthode d’avenir dans la gestion des services et la réalisation d’infrastructures ?


La co-décision publique-privée, c’est une manière d’intégrer, notamment dans des secteurs qui sont complexes comme le ferroviaire, la complexité dans la manière de penser le développement du service. C’est seulement dans un mode de consultation, de co-construction, de co-décision publique-privée que l’on arrivera à élaborer ce genre de choses. Notamment sur la gestion des services, sur la réalisation d’infrastructures (financement), il faut être beaucoup plus dans une dynamique de partenariat. Cependant, pour que le réseau ferroviaire reste performant, il doit être géré par un seul acteur (SNCF Réseau). Dans une logique de décentralisation, la co-décision publique-privée peut également permettre des adaptations territoriales.

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